Couleurs de large. Nicolas de Staël

L’espace pictural
est un mur
mais tous les
oiseaux du monde
y volent librement
à toutes profondeurs
N. de Staël

 

Est-ce qu’un tableau peut-être tache et rien d’autre? Je n’en sais rien. Le large est à tout le monde, seulement chacun a des narines différentes pour en percevoir tout ce qu’il peut.
in À Pierre Lecuire, décembre 1949, in Jean-Louis Andral, Nicolas de Staël ciels, terres, mers. Éditions des Falaises, Rouen 2014.

 

« Ce qui est important dans ce que vous dites, c’est que vous donnez un aspect de votre avis, alors que la peinture, la vraie, tend toujours à tous les aspects, c’est à dire à l’impossible additiodestaelfiesolen de l’instant présent, du passé et de l’avenir.
Les raisons pour lesquelles on aime ou l’on n’aime pas ma peinture m’importent peu parce que je fais quelque chose qui ne s’épluche pas, qui ne se démonte pas, qui vaut par ses accidents que l’on accepte ou pas.
On fonctionne comme on peut. Et moi j’ai besoin pour me renouveler, pour me développer, de fonctionner toujours différemment d’une chose à l’autre, sans esthétique à priori(…)
Le contact avec la toile je le perds à chaque instant et le retrouve et le perds…
Il le faut bien parce que je crois à l’accident, je ne peux avancer que d’accident en accident, dès que je sens une logique trop logique cela m’énerve et vais naturellement à l’illogisme.
Tout cela bien sûr n’est pas facile à dire, n’est pas facile à voir, il n’y a pas de vocabulaire et, si vous voulez, le système métrique de cela restera à inventer lorsque j’aurai fini de peindre .
Antibes, janvier 1955 »
in Nicolas de Staël « Lettres » Editions Ides et Calendes 

 

 

Il faut lire aussi le magnifique livre de sa fille, Anne de Staël, où les mots inspirés par les souvenirs, accompagnent amoureusement cette peinture.

« Le moment où un peintre fait ce qu’il n’a pas voulu, dans la rapidité. Ce qu’il surprend fait partie d’un désir d’absolu qu’aucune volonté ne vient déranger. »
« Le tableau ayant tout pris, pendant combien de temps le peintre pourrait-il recréer des mondes ? Pas à l’infini, d’où la mesure dans la démesure. Ici nous sommes devant un exemple de la fronde de la contradiction. Une oeuvre peut-elle brûler le temps par sa densité ? »
Anne de Staël « Staël, du trait à la couleur » Imprimerie nationale Editions 2001